7 questions pour comprendre le droit à la déconnexion

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le droit à la déconnexion, sans jamais oser le demander

1 – De quoi s’agit-il ?

Concrètement, il s’agit d’assurer le respect des temps de repos et de veiller à la préservation de l’équilibre vie pro / vie perso, en s’assurant que la première n’envahit pas la seconde par le biais des outils numériques.

Un second objectif est également visé : sensibiliser tous les acteurs de l’entreprise à un usage « raisonnable » des outils numériques au travail : autrement dit, éviter l’asphyxie par les mails et l’infobésité.

En somme, il s’agit de maîtriser les conséquences de la transformation digitale des entreprises.

2 – Quelles sont les obligations légales ?

Les entreprises de plus de 50 salariés doivent négocier avec les partenaires sociaux un accord d’entreprise sur la mise en place de dispositifs de régulation de l’utilisation des outils numériques : cette démarche s’insérera dans le cadre des « Négociations annuelles sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail ».

Dans le cas où la négociation n’aboutit pas à un accord, l’employeur doit élaborer une charte définissant les modalités d’application du droit à la déconnexion.

Pour les « moins de 50 salariés », pas d’obligation d’accord ni de charte ; en revanche, elles restent tenues de former et sensibiliser leurs employés à un « usage raisonnable des outils numériques ».

3 – Y a-t-il des sanctions prévues en cas de manquement à la règle ?

Curieusement, il n’y a pas de sanctions spécifiques, si ce n’est la constatation du non-respect de l’obligation de négocier, sanctionné pénalement par un an d’emprisonnement et 3.750 € d’amende (art. L.2242-8). Mais on imagine mal une application à la lettre de cet article, dans ce cas.

Cependant, en cas de litige devant les prud’hommes, l’absence d’accord ou de charte peut être utilisée comme élément à charge contre l’employeur pour contribuer à plaider le harcèlement moral : les conséquences indirectes ne sont donc pas négligeables.

4 – Que contiennent les accords (ou les chartes) sur le droit à la déconnexion ?

Ils prévoient généralement l’organisation d’actions de formation et de sensibilisation à destination des managers et de l’ensemble des salariés, ainsi qu’un engagement à faire un bilan annuel sur l’usage des outils numériques professionnels.

Ils contiennent aussi des recommandations sur le bon usage du mail (pas d’abus de Cc, pas de « répondre à tous », etc.) et sur les risques de stress liés au mauvais usage des outils numériques professionnels (mails ou sms tardifs, …). De même, ils rappellent les règles liées à la déconnexion en dehors du temps de travail effectif, en précisant les cas particuliers complexes : télétravail et forfaits jours.

Certains accords vont plus loin, en s’engageant par exemple à couper l’accès au mail, à l’intranet ou aux outils collaboratifs, en dehors de plages horaires considérées comme normales. Mais cela reste rare, dans la mesure où les effets secondaires négatifs de ces mesures sont souvent très importants (par exemple, un afflux massif de mails à la réouverture des serveurs …).

5 – Quelles sont les bonnes raisons d’y aller … ?

On peut voir 3 niveaux de motivation possibles :

  1. A minima, se mettre en accord avec la loi ce qui, au vu de ce qui précède, reste faible
  2. Entretenir un dialogue social de qualité
  3. Traiter de manière volontariste un sujet à fort enjeu pour l’entreprise, soit pour corriger une situation à haut niveau de risques psychosociaux, soit – dans le meilleur des cas – pour cultiver une exemplarité managériale en matière de respect de la vie privée des salariés.

6 – … ou de ne pas y aller ?

D’abord, certains doutes pèsent sur l’avenir de la Loi Travail : sera-t-elle maintenue en l’état par le prochain gouvernement ? N’est-il pas urgent d’attendre ?

A un autre niveau, aborder ce sujet peut mettre en évidence des problèmes antérieurs sur le temps de travail, comme les conséquences – pas toujours prises en compte au niveau des entreprises – des accords de branche retoqués ces dernières années sur les forfaits jours : « soulever le couvercle » est parfois porteur de risques !

Enfin, comme toujours, ce dossier n’est pas le seul sur votre bureau : d’autres sont peut-être plus prioritaires et vous amèneront naturellement à « jouer la montre ».

7 – Quels conseils pour ceux qui veulent se lancer ?

Avant tout, être clair sur ses motivations : on n’abordera pas le sujet (et en premier lieu, le dialogue avec les partenaires sociaux) de la même manière si on vise une simple mise en conformité avec la loi, ou une démarche managériale exemplaire, voire pionnière.

Ensuite, rester pragmatique et éviter les plans d’actions pléthoriques qui ne seront jamais mis en œuvre : quelques mesures bien ciblées peuvent s’avérer beaucoup plus efficaces.

Enfin pour les plus ambitieux, en profiter pour innover, faire appel à la créativité de ses équipes, aller chercher des bonnes pratiques à l’extérieur : en un mot, transformer une contrainte légale en opportunité de projet pilote.

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